Je vous explique
Je vais tâcher de vous expliquer ce qui a mal fonctionné jeudi.
Tout d’abord, pour ceux qui ne sont pas enseignants, il y a
au mois de mars, ce qui s’appelle le « mouvement », à savoir, à notre
disposition la liste de tous les postes vacants sur le département. Certains
sont dits « fléchés » c'est-à-dire réservé à ceux qui ont le diplôme
pour enseigner l’anglais.
En tout et pour tout sur ma ville, il y a 5 postes normaux
en primaire.
Chacun postule, et les postes sont attribués, selon un
barème dont je vous passe les détails, c’est comme un vaste jeu de pions, où
les plus forts gagnent.
Ceux qui peuvent enseigner l’anglais sont prioritaires
quelque soit l’ancienneté.
Avant c’était le nombre d’années dans le métier qui
priorisait les candidats.
Bref, étant en maladie, je me suis posé la question à savoir
si je devais mettre mon poste à disposition, afin que le remplacement soit
assuré de façon stable, mais pour demander quoi ?
Les différentes personnes que j’ai contactées m’ont toutes
donné un avis différent, le toubib, « c’est vous qui voyez »,
l’administration «oui absolument »
Bref, ennuyée, j’appelle jeudi matin l’assistante sociale.
Déjà, elle ne se souvenait absolument pas de tout notre entretien, durant lequel, elle m’a guidée pour les démarches concernant l’obtention d’un congé longue maladie.
Je l’ai toujours trouvée molle, au propre comme au figuré, mais j’avais besoin d’être guidée.
J’avais l’impression en l’entendant parler au téléphone,
qu’elle était avachie dans un canapé, un cigare dans une main, et une bouteille
de whisky près d’elle.
Elle me dit de me mettre au mouvement, et me conseille des
postes spécialisés, genre direction de projets, animations d’équipes. Bref,
tout ce qu’il me faut.
J’hallucine.
Mais ce n’est pas tout. Elle ne sais même pas ce qu’est un
poste fléché, et c’est moi qui dois lui expliquer, là je commence à être un peu
déstabilisée.
Et pour clore le tout, elle me demande ce que j’envisage, je
lui rappelle notre entretien, et que j’ai fait ce qu’elle m’a conseillé, à
savoir cette demande de long congé.
Et là elle me dit que c’est prématuré, que ça va être
refusé, qu’il faudra faire appel, et j’en passe.
Je clos l’entretien et je m’écroule.
J’attends une heure décente pour appeler mon psy, qui est
très au fait de tout ça, et il faut que j’aie quelqu’un pour me calmer. Pour
avoir un repère.
J’y parviens, et il me dit que je ne suis pas la première à qui on a dit que ça
serait peut être refusé etc……….. Cela l’interroge, et il ne compte pas en
rester là, et m’assure qu’en cas de problème, il en faisait son affaire. Me
voilà quelque peu rassurée, mais pas plus avancée pour ce foutu mouvement dont
la date limite est le 26/03.
Je mets ma fierté de côté, mes soupçons et tout le reste, et
j’appelle ma directrice.
L’inspecteur est dans les murs, elle lui en a déjà parlé,
elle me rassure. Et moi, je finis la boîte de kleenex pendant la discussion.
Elle me confirme que je ne suis pas obligée de participer au
mouvement, me dit que je suis nommée chez elle, et que ce n’est pas le
problème.
Que je suis une bonne instit, que je ne dois pas en douter.
Elle se charge des remplacements, et me dit que la priorité
c’est ma santé, que le reste on s’en fout.
Elle a le bras long, l’inspecteur aussi, elle s’entend bien
avec lui, et elle me dit qu’il va suivre de près ma demande pour m’aider. Elle
sait que ma situation financière nécessite l’obtention de ce congé, car c’est à
plein traitement.
Que ce serait ridicule que je m’embarque dans un poste de
remplaçant où il faut valser de la petite section au cm2, ce dont je ne suis
pas capable, elle me le dit et je confirme.
En bref, elle prend tout en main. Et me parle de mes
loisirs, me demande ce que je fais pour me changer les idées.
Mais c’est râpé , à part pleurer, je ne peux plus rien dire
la vanne est ouverte.
Bref, c’est la première fois que mes fils me voient
m’écrouler.
Pulsahr a été super. Il se faisait à manger, et en même
temps relevait tout, point par point, en faisant la synthèse en même temps.
Tout en étant calme et serein.
Il a fait le bilan, et pour lui ne retient qu’une chose,
j’ai tendu la main, et quelqu’un l’a saisie.
Rhalph c’était plus un truc du genre, « mais c’est quoi
cette grosse conne d’as ! p**** ça me troue le c*** »
Pulsahr est parti en cours, et Rhalph est resté,
silencieux mais attentionné, comme à son habitude.
J’ai posté la note précédente, et le fait que je vous ai dit
« bon week end » prouve à quel point j’étais à côté de la plaque.
Je ne range rien, je prends quand même ma douche, et je vais
me coucher.
En espérant que dormir, sera comme si je recommençais une
nouvelle journée en me réveillant.
Bien évidemment, je n’ai pas dormi, mais je suis restée en « grève »
sous ma couette.
Après légumage devant la télé, pas mangé, j’ai loué via la
freebox, un film « le chacal », et comme ça je n’ai pas pensé.
Rhalph passait régulièrement me voir. Son affection est
silencieuse, mais discrète.
Et les pilules magiques ont fait que j’ai bien dormi le
soir.
Mais le lendemain, vidée, un ballon de baudruche percé. Je
me suis bougée, pour faire des courses et un peu de ménage, et puis sieste,
cette fois ci, j’ai pu dormir.
Mes fils ont été sympas, Pulsahr avait eu une bringue
d’étudiants la veille et n’était pas opérationnel, normal, mais les courses ont
été montées en deux secondes, et ils rangeaient, je vois leur assiette qui
refroidissait, je leur dit de me laisser et de manger pendant que c’était
chaud.
Bref, moi je sous-estimais les ravages de la dépression. Une belle saloperie, un jour ça va mieux, et on se casse la figure encore plus deux jours après.
Même mon rhalph ne voulait rien manger hier soir. Il n’était pas en forme me disait-il.
Donc ce soir je leur fais un bon repas, parce que s’il se
met trop en osmose avec mon mental, c’est pas bon du tout.
Je savais bien qu’il ne fallait pas qu’ils me voient trop
mal.
Mais bon, c’est fait, ça recommencera peut être, mais là ça
va mieux.
Je vois mon psy cet après midi.
Tout à l’heure marché, et préparation d’un repas.
Je ne souhaite ça à personne, prenez soin de vous,
n’attendez pas trop pour faire un break, quand c’est trop. Apprenez à vous
faire plaisir.
Bref, faites tout le contraire de ce que j’ai fait.
Merci à tous pour votre amitié. Oui, je pense que c’est le
terme qui convient au minimum.
Edit :
Pendant que je rédigeais cette note ma directrice m’a
appelée, elle a téléphoné partout ; mon dossier passe en commission lundi,
en urgence, et je serai convoquée auprès d’un médecin expert très vite.
Elle me dit aussi que mon inspecteur (avec lequel elle s’est longuement
entretenue pour moi) a fait avancer les
choses et lui a fait dire de ne pas hésiter à demander à le rencontrer si j’ai
besoin de conseils ou tout simplement d’écoute.
Je suis abasourdie, moi qui ne sais pas appeler à l’aide, je l’ai fait, et j’ai eu en retour, bien plus que ce que j’espérais.
Ma grande gueule et mon caractère altier sont en train de s’étioler, mais c’est là, la plus magistrale leçon de vie que j’ai jamais eue.
C’est sans doute le plus important.